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⊹ light up the world

Une sœur.
Ils étaient là, ils riaient aux éclats. Ça faisait longtemps qu'ils n'avaient pas ri comme ça, et puis ça leur faisait du bien de rire pour rien. Un jour, ils s'étaient perdus, retrouvés et reperdus des centaines de fois, avant de se tomber dans les bras. Joan, c'était la seule fille qu'Elliot avait autant aimé. C'était son âme sœur, son ultime coup de foudre. Il aurait pu donner sa vie pour elle, malgré leurs différences et malgré leurs différends. Elle représentait tout ce qu'il y avait de plus merveilleux à ses yeux. Elle avait toujours été belle et intelligente, Joan, et même si elle n'avait que seize ans et lui dix-neuf, il se dégageait de sa voix, son visage, son sourire, quelque chose de mature qui l'avait toujours apaisé, qui l'avait toujours impressionné. Il était tombé sur la mauvaise place, après tout ; celle du cadet détesté, celle de l'intrus et de l'inconnu. Et même s'il avait la tignasse blonde de sa mère, et même s'il avait les yeux clairs de son père, il n'avait ni la philosophie de ce dernier, ni la logique de cette dernière. Elliot, il était violent et pas très intéressant, il draguait tout ce qui bougeait, et il fumait tout ce qui se fumait. C'était ni très légal ni très intelligent, mais c'était marrant. Puis, c'était un peu plus attrayant que son ennuyante vie de cadet. Il y avait cette sœur parfaite qu'il jalousait et aimait tant, qu'il aurait voulu protéger par tous les temps. Mais, à chaque fois qu'il se retrouvait à ses côtés, c'était comme s'il se sentait humilié, rabaissé, enfoncé six pieds sous terre. Oh, comme il ne méritait pas cette digne et loyale sœur qui honorait ce nom de famille souillé par la tâche qu'il était, par la sang qui coulait de ses phalanges, par la fumée qui sortait de ses poumons.
Ils étaient là, ils riaient aux éclats.

Un frère.
« T'es con Elliot putain, regarde-toi ! Pourquoi tu fous ta vie en l'air comme ça ? » Il répétait cette phrase presque tous les jours depuis des années déjà. Depuis qu'il avait commencé à déconner et que rien ni personne n'avait pu l'arrêter. C'était comme un ouragan qui s'était abattu sur la vie du cadet O'Ray ; indestructible, invincible, il l'avait emporté avec plus de puissance que l'amour ou que la vérité. Et puis, il y avait Nat, qui le regardait s'enfoncer, du haut de son trône d'aîné. Sa couronne de lauriers élevée sur ses éclats aussi noirs que les plumes d'un corbeau, il semblait apaisé et détendu, et il avait cette force divine sur le visage qui le rendait beau. Une beauté inapprochable, une beauté aveuglante. Elliot le détestait, et il ne savait même pas s'il l'enviait un peu. Peut-être beaucoup. Tout ce qu'il savait, c'était qu'il le détestait. Depuis petit il était le préféré des parents, et depuis petit il jouait au prince charmant, trop fragile et trop pathétique aux yeux d'Elliot. Plusieurs fois ils s'étaient battus, et bien souvent, c'était Elliot qui saignait, du rouge écarlate débordant sur ses vêtements. Nat était dominant, Nat était l'incarnation d'une perfection que tout le monde lui inventait, lui administrait, et il débordait d'égo et de fierté. Il transpirait le narcissisme, il sentait l'amour de sa propre personne. Et ça puait, dieu que ça puait. C'était insupportable.
Elliot le détestait.  

Surtout de la connerie.
Ils l'avaient poussé à bout. Il avait pété les plombs. Il en avait eu marre de cette adolescence de merde, de ces boutonneux sans honneur, de cette famille sans valeur. Et même si Joan restait dans son estime, et même si elle le faisait toujours autant rire aux éclats, il était parti. Il ne les avait pas totalement abandonné, puisqu'il n'y avait plus aucun attachement. Il était parti sans dire au revoir, sans claquer la porte, sans même une dispute. Il était parti et on l'avait laissé faire. Il n'était plus un enfant maintenant.
Los Angeles. La ville des anges. La ville des morts. Los Angeles la nécropole. Il lui avait fallu du courage pour bouger jusque là, et traverser presque tout le pays pour reconstruire sa vie. Ou pour la détruire complètement. Il n'avait pas hésité bien longtemps, et dès qu'il avait entendu parler de ces deux gangs qui s'affrontaient en ville, il avait sauté sur l'occasion. Se trouver une nouvelle famille. Peut-être repartir sur de bonnes bases. Peut-être pas. Et chaque soir à nouveau, il laissait sa rage s'exprimer, il hurlait, il criait, il tapait. Il était en colère contre tous ces fous et il voulait que ça se voit, pour une fois. Il voulait montrer qu'il était là.
Et chaque jour un peu plus il tombait dans la débauche, la déchéance totale, l'abandon minable de la conscience et de l'âme.
« J'ai besoin de fumer une clope. »